C‘est juste aléatoire ; tout va bien. La Une de l’huma aurait pu me faire pleurer, mais le filage de mon existence fixe les règles opportunes, la trace piquante de quelques battements sucrés. Une main légère dévrille le temps. Je suis un voleur de petite chance !
Ma tête est perdue. Ni espiègle ni ambigu, ni sot ni exagérément malin, le python que j’ai dans la manche me donne un air emprunté et perplexe. Presque inquiet.
Le projet ambitieux d’oser nécessite la mise à distance des épiphénomènes. Il assigne les doutes et les douleurs dans l’arrière-cuisine des commis du quotidien. Il requiert sans cesse la réserve et la retenue. C’est d’abord ceux que l’on aime qui paient le cirque !
Je dois d’abord conserver mon ironie ! C’est utile, c’est vital !Les coupeurs de têtes du dedans, les chasseurs gascons de tyrans ne doivent pas avoir raison de mon inapparente légèreté. Je veux que surgissent des pensées simples et convenables.
Je n’ai rien écouté, je n’ai rien vu de ce congrès. Ce n’est pas grave. Dimanche matin, entre deux drapeaux, j’ai chapardé ça :
« A nous de penser à cet univers sans âge dans lequel, pour une raison inconnue et comme une conséquence des mécanismes intimes qui l’animaient, au moment où la lumière fut, la conscience surgit et avec elle la capacité d’être des humains dans la résistance et dans le rêve du futur. »
Je suis un voleur de petite chance.
Sans doute que dans mon plan, - je n’ai pas l’air mais je planifie- dans le regard hirsute, le poil matois et le sourire vengeur de quelques habiles, j’ai, nous avons dû louper deux ou trois petites choses qui rendent l’ensemble si bancal qu’il pourrait lui arriver de s’écrouler. Mais en réalité, seul le mouvement continu crée l’équilibre des forces qui vont.
Il faut laisser aux stoïciens la passion du calme et du ferme, du fixe et de l’immuable, la passion de l’invariable, du robuste et du persistant. Pour autant que nous soyons bizarres et assurés il nous faut chasser l’improbable tentation de la solitude universelle de ceux qui ont raison contre tous !
Le cours nouveau que nous voulons apposer sur l’histoire n’est pas l’estampe d’une révolution brouillonne dont seul adjectif de citoyenne suffirait à unifier les forces éparses de la contestation sociale et politique de l’ordre établi.
Il ne suffit pas de vouloir couper les têtes, il faut être enseigné et instruit sur la nature du tyran. Une phrase de trop, un délégué de trop, et je suis prêt à me laisser gagner par le flot dévastateur des doutes pervers que colportent les rongeurs de toutes espèces !
Je me hais d’avoir laissé passer ce guignol à la tribune !
Peut-être s’agit-il que d’un épiphénomène, un truc improbable qui se rajoute sans exercer aucune influence sur le cours général des choses, une apparence particulière d’un phénomène sous-jacent…
Pierre Bahoum peut donc monter à la tribune pour abattre qui il veut, il ne s’agit pas d’une manifestation possédant une réalité indépendante capable d'exercer une quelconque rétroaction sur le sacré phénomène qui lui a donné naissance.
Je sais bien que je ne suis qu’un voleur de petite chance !