mardi 29 janvier 2013

L’âne, la LGV et la métropole….

anne.jpgPrenez un âne de tournefeuille (banlieue de Toulouse) et donnez lui rendez-vous place de la  République à Paris, que croyez vous qu’il fera ? Il partira en direction de Limoges, puis d’Orléans pour rejoindre enfin Paris ! Oui mais voilà, il s’agit bien d’un âne.

 Pour les grands de ce monde, les choses ne se présentent pas ainsi, la bataille idéologique que mènent les puissants n’est faite que de  vitesse, de mobilité fulgurante, de modernité et de développement économique qui débarquerait de métropole en métropole dégueulant son flot d’hommes d’affaires et de créateurs  de cluster en pôle d’excellence , D’Euralille à  Euratlantique, le développement serait comme la Samba Brésilienne, allant de ville en ville, nous sommant d’apprendre le pas !

Pauvres habitants incultes de Marmande, ou d’Agen, de Mont de Marsan ou de la banlieue paloise, nous qui ne rêvions que d’une société équilibrée, durable, conviviale… une sorte de société faite pour tous… un petit goût de République… Nous voilà devenu arriéré, conservateur, immobiliste, obscurantiste, réactionnaire. Un comble !

L’époque est fantastique où les squatteurs du parti de Jaurès mettent en œuvre, sans complexe, la plus ancienne des politiques libérales : la politique de l’offre !

 C’est la rhétorique du nouveau, c’est longue litanie  de l’annonce de la fin, des fins. Fins des idéologies, fins des Etats-nations, fin des territoires, fin de la lutte des classes ! C’est l’annonce triomphante du « post » ; postmodernité, postindustriel, post-fordisme…

C’est cette conversion fulgurante d’une parie de la Gauche  aux politiques de l’offre qui justifie à la fois le mythe métropolitain et le mirage de la grande vitesse, le pacte de compétitivité… il suffirait de faire des grandes gares allant de là à là pour voir débarquer emplois et prospérité ! Il suffirait de produire des trucs et des machins le moins cher possible pour que l’économie reprenne… Quelle absurdité…

Extravagant renversement idéologique  que de voir  la pensée dominante, historiquement dressée contre ceux qui voulaient  du « passé faire table-rase » annoncer  à son tour un monde d’expert et de technocrates qui nient l’histoire, le passé.

Comment peut-il se faire, qu’intelligents comme ils sont, ingénieurs de RFF, Présidents de régions, ministre de la République, comment peut-il se faire qu’ils n’entendent pas  que l’aménagement du territoire  est d’abord  et par nature le théâtre de la lutte contre les déséquilibres. Ceux de la société ceux de l’économie…la-fabrique.jpg

La métropolisation heureuse, la ville millionnaire, la ville des cinq sens de Vincent Feltesse n’est que l’habillage d’une logique désormais admise par les élus du Parti-Sérieux. Dans la rhétorique du nouveau se dissimule l’acceptation d’un monde de gagnants et de perdants.

Du reste, les villes et les régions ne sont pas des entités dont on puisse parler comme des êtres, ce ne sont pas les “personnages” de la géographie, mais seulement, et c’est déjà beaucoup, les formes spatiales d’organisations économiques, sociales et politiques, dominées par des individus, des groupes, des institutions (entreprises, pouvoirs publics, églises…), qu’on appelle aujourd’hui non sans euphémisme les “acteurs”, et dont on sait toutes les différences, voire divergences, d’intérêts.

La conversion à la politique de l’offre ne sert que les grands groupes industriels comme Vinci et Bouygues et consorts.

 

Depuis la révolution industrielle du XIXe siècle, la rhétorique de l'«impact», de l'«effet induit» des transports sur l'urbanisation et l'aménagement n'a pas cessé d'accompagner le développement des infrastructures de communication. L'administration de la preuve n'a pourtant pas été effectuée. Rechercher l'influence de la mise en service d'un équipement sur l'économie d'un territoire pose de redoutables problèmes méthodologiques. Les travaux empiriques rigoureux ne concluent, au mieux, qu'à une amplification et une accélération de tendances préexistantes. Si le mythe des effets structurants perdure, c'est en fait par l'usage politique qui en est fait dans les processus de décision et les procédures d'évaluation ex ante des grands projets.

 

Hier soir à Bordeaux, nous tenions à l’initiative des élus du Parti de Gauche  et d’EELV  du conseil Régional d’Aquitaine une réunion sur les grands projets GPSO de LGV. La salle était bien pleine, plus de 100 personnes étaient venus entendre la conclusion d’une étude indépendante, commandée par l’association ALTERLGV, co-présidée par deux élus du Front de Gauche.

lgvCette étude montre deux choses essentielles :

 Premièrement Toulouse ne sera jamais à trois heures de Paris en passant par Bordeaux, jamais en train, ou bien celui ci ne s’arrêta nulle part entre Paris et Toulouse et ne sera donc jamais rempli, jamais rentable, et donc parfaitement inutile.

Deuxièmement l’ensemble de cette présentation effectuée par GPSO, engage les décideurs sur des budgets voisins de 20 milliards d’euros inutilement, RFF ayant sciemment communiqué de manière trop optimiste sur ce projet.

En quittant la réunion, une gentille dame, bien mise et soucieuse de la dépense publique m’interpelle et me dit : « mais ce sont vraiment des ânes ! »